12 décembre 2013

Principes de base pour le traitement de la dépression chez les moins de 18 ans

Le traitement de la dépression est bien étudié chez la clientèle adulte. Pour les adultes la littérature est plutôt étoffée pour les alternatives au traitement pharmacologique, les durées de traitement cibles, les agents à favoriser, le monitoring à effectuer et plus encore. Toutefois, les études en psychiatrie incluent rarement les enfants, alors les connaissances sur le traitement des troubles psychiatriques en pédiatrie sont souvent un reflet du traitement de l’adulte adapté selon les intuitions ou le faible nombre de données cliniques.

Chez les mineurs, il est important de mentionner que le support parental, les mesures non pharmacologiques sur l’environnement ainsi que l’entourage et le principe de viser les doses minimales efficaces sont primordiaux au succès d’une prise en charge.

Il est reconnu dans la littérature que le traitement à l’aide d’antidépresseurs est à risque d’augmenter le risque de suicide chez les enfants et les adolescents. Cette crainte existe encore aujourd’hui, mais il n’empêche pas le traitement lorsque la thérapie psychologique et les autres approches sont inefficaces. C’est pour ce risque que certains antidépresseurs comme la paroxetine, la venlafaxine ou bien le bupropion seront généralement évités en pédiatrie. L’augmentation du taux de suicide semble s’expliquer par différents mécanismes comme le syndrome d’activation ou l’augmentation de l’énergie qui permettent de passer à l’acte. Le syndrome d’activation se caractérise par une augmentation de l’anxiété, de l’irritabilité, de l’impulsivité, de l’agitation, de l’insomnie et d’autres symptômes semblables au début du traitement avec l’antidépresseur. Il est donc important dans un début de traitement d’aborder ce sujet avec le patient et ses parents de préférences. Le syndrome d’activation pourrait aussi être difficile à distinguer d’un virage maniaque chez un patient bipolaire.

L’association américaine de psychiatrie chez les enfants et adolescents (AACAP) recommande de traiter la dépression majeure lorsqu’un trouble bipolaire a été exclu, avec une monothérapie de préférence, faire un suivi des changements de comportements et diminuer la dose ou arrêter le traitement si activation ou autre changement important chez le patient. Les recommandations du centre de pédopsychiatrie du Québec (CPPQ) au niveau de la thérapie établissent un ordre dans les intentions thérapeutiques. Les ISRS devraient être utilisés en première et seconde ligne (sauf la paroxétine), en troisième ligne on retrouve la venlafaxine, le bupropion, le mirtazapine, le lithium et les antipsychotiques atypiques alors que finalement en dernière intention se retrouve les tricycliques. L’étude TORDIA (Treatment of SSRI-resistant Depression in Adolescent) a établi que la venlafaxine ou un autre ISRS en plus de la thérapie cognitivo comportementale est la meilleure alternative lors d’échec avec un ISRS. Parmi les ISRS, la FDA a approuvé la fluoxétine et l’escitalopram pour le traitement de la dépression majeure chez les adolescents (12 à 17 ans).

Bref, il est possible de comprendre, en intégrant les principes cités plus haut, pourquoi les prescripteurs semblent tendre plus rapidement à utiliser les antipsychotiques dans la population juvénile. Les médecins sont contraints à être prudents avec le choix de l’antidépresseur, alors un succès partiel mérite d’être optimisé avant de changer de traitement. La crise de l’adolescence, le syndrome d’activation ou le potentiel virage maniaque peuvent tous influencer sur l’ajout d’un antipsychotique plutôt que l’essai d’un autre médicament. Cependant, il faut garder en tête que chez la population adulte, la potentialisation avec un antipsychotique est associée avec une augmentation marquée d’effets indésirables et des bénéfices modestes alors une évaluation attentive de chaque situation est de mise avant le début d’une telle association.

Référence:
Psychopharmacologie clinique en pédiatrie, Karine Desharnais, Novembre 2013
Uptodate. Overview of treatment for adolescent depression, consulté le 2013-12-09
Spielmans GI, Berman MI, Linardatos E et coll. Adjunctive Atypical Antipsychotic Treatment for Major Depressive Disorder: A Meta-Analysis of Depression, Quality of Life, and Safety Outcomes. PLOS Medicine 2013;10:e1001403.

Rédigé par M.L. étudiant en pharmacie


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