20 octobre 2013

L’utilisation de l’amantadine pour le traitement de la fatigue associée à la sclérose en plaques

La sclérose en plaques est une maladie auto-immune qui se caractérise par une inflammation et une démyélinisation des fibres nerveuses du système nerveux central. L’atteinte des neurones peut se rendre jusqu’à une dégénérescence axonale. Les patients atteints de sclérose en plaques peuvent présenter différents symptômes selon l’endroit atteint par la maladie. Le symptôme le plus fréquent (76 à 92 %) et l’un des plus invalidants (55 à 75%) pour les personnes souffrant de cette maladie est la fatigue. Le mécanisme expliquant la fatigue n’est pas bien compris, mais il existe certains médicaments qui peuvent aider à réduire la fatigue.


L’amantadine est l’un des médicaments suggérés pour le traitement symptomatique de la fatigue. Elle serait considérée comme un agent de premier choix par certaines références. Une étude Cochrane publiée en 2009 a évalué l’utilisation de l’amantadine pour le traitement de la fatigue chez les personnes souffrant de sclérose en plaques. Le mécanisme d’action de ce médicament pour le traitement de la fatigue n’a jamais été élucidé. Les différentes études intégrées dans la revue Cochrane ont comparé l’amantadine à un placebo dans des études randomisées avec ou sans croisement et avec des durées de traitement d'amantadine 100 mg bid entre une semaine à trois mois. Différentes échelles d’évaluations (validées ou non) de la fatigue étaient utilisées pour évaluer l’efficacité du traitement par le patient. Pour résumer, la revue Cochrane spécifie que les études disponibles présentent beaucoup de biais, les gains potentiels sont assez faibles, la tolérance envers les effets au SNC peuvent être limitant (jusqu’à 13 % d’abandon lors de prise pour prophylaxie de la grippe) la méthodologie et le suivi étaient souvent insuffisants. C’est pour cette raison que la revue Cochrane conclut que ce traitement manque d’évidence pour être recommandé et qu’il y a peu de données pouvant supporter son utilité. Plusieurs études ont tout de même démontré une efficacité pour la réduction de la fatigue. Avec les doses utilisées dans la fatigue reliée à la SEP, les effets indésirables sont beaucoup plus rares que dans son utilisation pour la prévention de l’influenza.


D’une autre part, une étude publiée en 2000 a évalué l’effet neuroprotecteur de l’amantadine. Cette étude semble démontrer que son utilisation chez les gens atteints de sclérose en plaques permettrait d’aider à mobiliser les fonctions cognitives et de mieux traiter l’information. Toutefois, le plus grand facteur influençant la capacité à mobiliser l’information est la durée de vie avec la maladie.


À la lumière de ces informations, il est évident qu’un traitement d’amantadine pour la fatigue dans la sclérose en plaques soit remis en doute. Par contre, une révision rapide des traitements suggérés pour la fatigue liée à la SEP ainsi que les évidences supportant ces traitements permet de voir qu’aucun agent ne possède de base solide. Les autres agents possibles sont le modafinil et le methylphenidate. Le modafinil, qui est un agent pour le traitement de la narcolepsie, semble causer plus d’effets indésirables que l’amantadine et a été moins étudié dans la sclérose en plaques. Le methylphenidate est suggéré selon Uptodate, mais aucune documentation scientifique ne semble avoir évalué cet agent. Compte tenu du manque de connaissance sur la fatigue et de son traitement dans la SEP, il est difficile d’émettre des recommandations, mais l’amantadine semble être un premier choix de traitement. Une approche conservatrice avec les agents suggérés, un suivi adéquat des comorbidités comme la dépression, la douleur ou les troubles du sommeil ainsi qu’un bon lien de confiance avec le patient sont les meilleures ressources pour la prise en charge de cette réalité importante des patients par les spécialistes.


Références:


Pucci E, Brañas Tato P, D’Amico R, et coll. Amantadine for fatigue in multiple sclerosis. Cochrane Database of Systematic Reviews 2007, Issue 1. Art. No.: CD002818. DOI: 10.1002/14651858.CD002818.pub2.


Sailer M, Heinze H.-J, Schoenfeld  M. A et coll. Amantadine Influences Cognitive Processing in Patients with Multiple Sclerosis. Pharmacopsychiatry 2000; 33: 28-37.


Braley TJ; Chervin RD. Fatigue in multiple sclerosis: mechanisms, evaluation, and treatment. SLEEP 2010;33(8):1061-1067.


Brown JN, Howard CA, Kemp DW. Modafinil for the treatment of multiple sclerosis-related fatigue. Ann Pharmacother. 2010 Jun;44(6):1098-103.


Olek MJ. Comorbid problems associated with multiple sclerosis in adults. Uptodate [consulté le 2013-10-16].


Rédigé par M.L., étudiant en pharmacie

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