29 novembre 2013

Prise en charge de l’hypokaliémie

Les électrolytes sont des constituants essentiels aux fonctions de l’organisme. Leur rôle est d’assurer un équilibre de la pression osmotique cellulaire, la conduction nerveuse, la contraction musculaire, la conduction cardiaque, etc. Un équilibre de charge positive et négative ainsi que des concentrations des électrolytes est essentiel à notre fonctionnement optimal. Les hyponatrémies et les hypokaliémies sont des désordres que l’on retrouve fréquemment chez les personnes avec une fonction rénale altérée par une maladie, par la médication ou chez les gens ayant un apport insuffisant jumelé avec des pertes excessives. Il est important de corriger les déficits en électrolytes pour éviter les complications allant de simple chute de pression à des arythmies malignes potentiellement mortelles. Ce texte résumera les principaux principes de prise en charge de l’hypokaliémie.

Il existe principalement deux grandes façons de refaire les réserves de potassium sérique (normal = 3,5 à 5,0 mmol/L) chez une personne présentant une hypokaliémie, soit l’utilisation de potassium pour refaire les réserves ou l’utilisation d’un agent qui vont limiter l’excrétion de potassium par le rein. Afin d’utiliser la meilleure méthode pour le patient, il est primordial d’identifier la cause de l’hypokaliémie, car la réponse au traitement peut varier dépendamment de la cause sous-jacente. L’hypokaliémie légère à modéré (entre 3,0 à 3,4 mmol/L) est souvent asymptomatique alors que l’hypokaliémie sévère (moins de 3,0 mmol/L) s’accompagne de faiblesses musculaires et d’arythmies, un suivi étroit de l’ECG est recommandé.

En premier lieu, lorsque la cause de l’hypokaliémie est un déficit par perte (ex: vomissements, diarrhées, etc.) le traitement de base est la supplémentation. Il est souvent recommandé du supplémenter par la voie per os lorsque le déficit est léger à modéré et d’utiliser la voie intraveineuse lorsque l’hypokaliémie est plus sévère. Il existe différents sels de potassium qui peuvent être utilisés, le chlorure étant le plus fréquent, il est possible de prendre du bicarbonate lorsque le patient présente une acidose métabolique ou le phosphate lors d’hypophosphatémie conjointe à l’hypokaliémie. Si le potassium sérique est très bas, il est recommandé de suspendre les agents pouvant provoquer son élimination pour rétablir plus rapidement la kaliémie du patient. Lorsqu’un patient reçoit une supplémentation de potassium sur une base régulière, il est recommandé de faire le suivi de la kaliémie aux 3 à 4 mois lorsque la dose et le patient sont stables.

En second lieu, lorsque l’hypokaliémie est causée par une augmentation de la sécrétion (ex: diurétique, hyperaldostéronisme, etc.) il est possible d’essayer de supplémenter. Par contre, la majorité du temps, le corps atteint un équilibre entre l’excrétion et l’absorption et lorsqu’on supplémente, l’équilibre va changer et le corps va excréter plus de potassium rendant ainsi la supplémentation inutile. Dans ce cas, il est plus efficace d’ajouter un agent dit "épargneur de potassium" qui va permettre de réduire l’excrétion rénale de potassium et retrouver une kaliémie à l’équilibre. Les différents agents sont: les IECAs, les ARAs, le triamtérène (Dyazide), l'amiloride (Moduret) et la spironolactone (Aldactone). L’amiloride et le triamtérène sont à favoriser en premier choix vu une meilleure tolérance et un coût plus faible de la thérapie. Avant d’initier ces agents, il est important de s’assurer que la clairance rénale est adéquate et faire le suivi de la fonction rénale et des ions du patient. Le suivi doit être effectué à l’initiation, une semaine et un mois après puis de façon régulière aux quelques mois. Le poids du patient peut être un marqueur intéressant pour un pharmacien d’officine pour évaluer l’état d’hydratation ou de la fonction rénale chez un patient à risque.

Bref, l’hypokaliémie est un désordre électrolytique qui peut être asymptomatique si léger, mais aussi très grave si sévère (rhabdomyolyse, arythmies,etc.) qui doit être pris en charge de façon adéquate. Pour un pharmacien d’officine, il est à peu près impossible d'identifier le problème, mais il est possible de contribuer au traitement en identifiant les causes médicamenteuses possibles et jugeant de leur pertinence dans le traitement du patient. Il existe une troisième cause d’hypokaliémie qui est plutôt reliée au milieu hospitalier, c’est la redistribution du potassium à l’intérieur des cellules qui est souvent provoquée par différents agents, l’insuline en perfusion et une activité bêta adrénergique accrue (nébulisation de bronchodilatateur, utilisation d’épinéphrine, stress intense,etc.) Ces causes sont souvent temporaires et la supplémentation doit être faite de façon prudente pour éviter une hyperkaliémie lors de la correction.


Références:
1- Uptodate. Clinical manifestations and treatment of hypokalemia, consulté le 2013-11-29
2- Gennari FJ. Hypokaliemia. N Engl J Med, 1998; 339: 451-8
3- Cohn JN, Kowey PR, Whelton PK et coll. New Guidlines for Potassium Replacement in Clinical Practice. Arch Intern Med. 2000; 160: 2429-36
4-Truven Health Analytics, Micromedex 2.0, 2013, consulté le 2013-11-29



Rédigé par M.L. étudiant en pharmacie

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